Au lendemain des élections fédérales, François Legault s’en prend déjà à la légitimité de Justin Trudeau, qui promet pour sa part d’en faire plus pour le Québec.
M. Trudeau a fait élire 35 députés au Québec, contre 32 pour le Bloc québécois. Mais François Legault croit qu’avec un vote populaire de 33 %, M. Trudeau n’a pas la légitimité pour se joindre au recours judiciaire contre la loi 21 sur la laïcité.
M. Legault estime que la renaissance bloquiste est l’expression d’un « vote nationaliste québécois », plutôt qu’une résurgence du mouvement indépendantiste.
Selon lui, ce vote nationaliste devra notamment se traduire par davantage d’autonomie pour le Québec et le respect de ses compétences, que ce soit en santé, en éducation, en immigration ou en environnement.
Justin Trudeau dit avoir reçu le mémo de l’électorat. « Mes chers Québécois, j’ai entendu votre message ce soir. Vous voulez continuer d’avancer avec nous, mais vous voulez aussi vous assurer que la voix du Québec se porte encore plus à Ottawa. Je vous donne ma parole : mon équipe et moi serons là pour vous », a lancé Justin Trudeau dans son discours de victoire, tard dans la nuit de lundi à mardi.
Catherine Côté, politologue à l’Université de Sherbrooke, croit que l’élection de bloquistes sera très avantageuse pour François Legault. « Ça devient une force qu’il va pouvoir utiliser. On convient que le NPD et le PLC sont assez proches. Par contre, le Bloc a un poids politique réel », estime-t-elle.
Le parti d’Yves-François Blanchet pourra braquer les projecteurs sur les lointains enjeux d’Ottawa avec une perspective de parti d’opposition nationaliste.
Coup de Jarnac
Mais quelle sera la relation entre M. Legault et M. Trudeau ? Le PM québécois est sorti de sa neutralité et a servi un coup de Jarnac au chef libéral en campagne électorale en dénonçant sa position sur la loi 21. Ce dernier a toutefois été réélu.
« Les relations intergouvernementales n’étaient déjà pas au beau fixe. Ça risque de rendre la relation plus difficile », note Stéphanie Chouinard, professeure adjointe au Département de science politique au Collège militaire royal du Canada, à Kingston.
Autre difficulté à prévoir, selon elle : la colère des Prairies. Le gouvernement Trudeau est « pris entre l’arbre et l’écorce » : un bloc à l’Est, et un autre à l’Ouest. Minoritaire, il devra maintenir l’unité nationale.
Faire de trop gros cadeaux au Québec pourrait stimuler davantage la colère de ces provinces, qui demandent déjà plus de pipelines et une refonte de la péréquation, ce qui est mal perçu au Québec. L’inverse est également vrai.
Tendances centralisatrices
Autre point de friction : un gouvernement minoritaire libéral soutenu par un NPD qui détient la balance du pouvoir pourrait s’ingérer dans les compétences des provinces. Le politologue Louis Massicotte, de l’Université Laval, rappelle que le NPD a de fortes tendances centralisatrices qui vont déplaire à François Legault.
Il ne croit pas que les résultats de lundi vont permettre au gouvernement caquiste d’avancer son agenda nationaliste, comme l’obtention d’une déclaration de revenus unique, par exemple.
« Les Québécois ont exprimé une sympathie pour le Bloc, mais est-ce que ça va faire bouger les choses à Ottawa ? J’en doute un peu », dit-il.
Alain G. Gagnon, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en études québécoises et canadiennes, a les mêmes appréhensions quant aux tendances centralisatrices de ces deux partis.
Boulerice bien seul
« Ça me semble problématique pour le gouvernement du Québec », dit-il en énumérant les nombreuses promesses de ces formations politiques dans le logement, les infrastructures ou la santé. Et Alexandre Boulerice sera bien seul au Québec pour rappeler au NPD les particularités du Québec. « On doit s’attendre à des confrontations significatives », dit-il.
— Avec la collaboration de Marc-André Gagnon
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